C’est une histoire qui finit bien, alors qu’elle était mal partie. En 2017 le projet Réa, la solution d’immersion en réalité virtuelle développée par Airbus Groupe Innovation, s’arrête. Faute de budget, l’avionneur décide de licencier toute la filiale. Cela n’arrête pas Hugo Falgarone qui reprend les concepts développés pour créer la startup SkyReal. Tout cela afin de valoriser une technologie innovante de prototypage virtuel.
En somme, Skyreal ambitionne d’être le référent en réalité virtuelle pour les grands groupes, notamment industriels. Comment ? En proposant la réalité virtuelle dans un environnement virtuel automatique de grotte (Cave Automatic Virtual Environment, ou CAVE en anglais). Plutôt qu’à travers les traditionnelles lunettes. Décryptage de cette innovation made in France.
La réalité virtuelle des entrepôts
Une grotte environnement virtuel automatique (plus connu sous l’acronyme CAVE) est une immersion en réalité virtuelle dans une salle où les projecteurs sont dirigés entre trois et six des murs d’un cube de taille chambre. Même si l’utilisateur porte toujours les fameuses lunettes 3D, la précision et le rendu sont différents, plus réalistes. Les systèmes de projection sont généralement en très haute résolution, pour gommer les pixels. Ce qui permet de conserver l’illusion de la réalité. Et c’est justement en misant sur cette réalité virtuelle que SkyReal espère séduire les grands groupes. Le 17 Septembre dernier à Saint-Nazaire, elle avait en tout cas invité des fleurons du capitalisme hexagonal (Total, Airbus, AKP…) à tester son nouveau dispositif.
Conquérir le marché des grands groupes
Ces derniers sont invités à comparer l’expérience de réalité virtuelle sur casque et dans une CAVE sur des scénarios de postes d’assemblages de pièces. Pourquoi cette forme de réalité virtuelle sans casque est plus adaptée aux besoins des industriels ? Selon Gregory Duvalet, conseiller technologique sur le campus, car elle « permet à des opérateurs, ou plus généralement des personnes pas spécialistes d’informatique, d’expérimenter facilement les opérations sur site, avec une vue d’ensemble ». Il ajoute également que cette solution permet une meilleure collaboration entre les différents métiers. Pour illustrer son propos, il prend l’exemple d’un ingénieur d’étude et d’un opérateur. Ils pourront désormais interagir facilement, en ayant le même environnement de référence. Alors qu’ils se trouvent à des centaines de kilomètres de distance. A la clé, les clients voient des avantages certains, bien qu’il soit difficile d’en calculer précisément le ROI, souligne-t-il. Le conseiller prend exemple sur la société Plastic Omnium qui, après avoir utilisé la VR sur place, a constaté un gain de temps de « 12 à 18 mois » sur ses process internes.
La réalité virtuelle grâce à … Fortnite
Pour que la résolution en CAVE atteigne la précision de celle du casque, il a fallu effectuer quelques ajustements. Comme synchroniser les ordinateurs (que l’on a équipé des cartes graphiques Quadro Nvidia, les plus chères du marché), les vidéoprojecteurs et maîtriser des technologies de suivi très fines. Mais surtout, le projet SkyReal a été rendu possible par la présence du moteur Unreal Engine de l’éditeur de jeux vidéo Epic Games. L’immense avantage, c’est que Epic Game travaille à une mise à jour de son moteur tous les mois. Car ce dernier sert à alimenter le jeu vidéo Fortnite. Fortnite, la simulation de combat dans une île déserte qui fait fureur auprès des ados, est une application gratuite en ligne. Et c’est le coup de génie incontestable de SkyReal qui bénéficie gratuitement et sans effort des mises à jour. « C’est comme si 500 ingénieurs travaillaient, aussi, pour nous, sans que l’on ne leur demande rien. » souligne le PDG de l’entreprise. Un avantage concurrentiel considérable, surtout au prix de l’embauche d’un ingénieur.
En France, on n’a pas de pétrole mais on a des idées, proclamait la publicité des années 70. C’est bien ce que prouve SkyReal, la startup en passe de conquérir le marché des grands groupes grâce à de nombreuses innovations, aussi bien techniques qu’organisationnelles. Entre la tech et le pays du fromage, l’amour continue.