La démocratisation des exosquelettes dans les usines se fait attendre. Il faut dire que l’enjeu est majeur. Car, en France, 87% des maladies professionnelles sont des troubles musculosquelettiques (TMS). Pour rappel, les troubles musculosquelettiques se manifestent par des douleurs et des gênes dans les mouvements. Des gênes qui peuvent entraîner à terme une incapacité au travail. Avec pour résultat baisse de productivité, souffrance et arrêts maladie. Les usines et ateliers en sont les principaux pourvoyeurs. Parmi les pistes évoquées pour améliorer la situation, les exosquelettes reviennent souvent dans la conversation.
Il faut dire que dire même l’Union Européenne en a officiellement vanté les mérites et l’efficacité. Pourtant, les difficultés à leur démocratisation demeurent. Lourds, parfois gênants, ils peinent encore à convaincre le plus grand nombre. Pour pallier cela, les fabricants d’exosquelettes optimisent continuellement l’ergonomie de leurs dispositifs. Ils proposent ainsi de plus en plus des modèles plus légers et polyvalents. Actifs ou passifs. Zoom sur cette nouvelle génération d’exosquelettes, censées envahir, enfin, les usines et les ateliers.
Vers des matériaux plus performants
Les exosquelettes font l’objet de constantes améliorations. « Tout l’enjeu de leur développement est de résoudre cette contradiction : ils doivent être suffisamment performants pour aider les opérateurs et suffisamment simples », détaille Yann Perrot, chef du service de robotique interactive au CEA List (laboratoire d’intégration des systèmes et des technologies). En effet, plus un exosquelette est complexe, plus son poids et son coût augmentent. Ce qui le rend soit inaccessible soit difficile ou même dangereux à porter. L’INRS préconise d’ailleurs de ne pas traiter les exosquelettes à la légère. Une solide formation est notamment recommandée pour éviter les accidents des travailleurs et d’autrui.
Au cours des dernières années, les innovations se sont justement concentrées sur le problème du poids. « En 2013, les exosquelettes pesaient entre 10 et 12 kg, rappelle Jean-Jacques Atain Kouadio, expert d’assistance à l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS). Aujourd’hui, on se rapproche des 2-3 kg. »
Ce spectaculaire allégement est notamment dû à un changement de matériaux. Les ressorts en acier ont peu à peu remplacé ceux en carbone. De plus, les fabricants se concentrent de plus en plus sur des dispositifs très spécialisés qui n’assistent qu’une partie du corps. Mais avec une plus grande efficacité. Les exosquelettes posturaux, par exemple, ne peuvent pas porter des charges excessivement lourdes. Mais ils permettent au travailleur de limiter sa fatigue lorsqu’il doit répéter les positions non naturelles. Plusieurs modèles sont capables de supporter une charge allant de 500 grammes à 4 kilos. Certains équipements passifs peuvent soutenir des charges allant jusqu’à 25 kilogrammes.
Une nouveauté majeure : l’assistance progressive
Les exosquelettes fonctionnent principalement selon le principe d’iso-élasticité. Le système permet de transporter une charge plus facilement et réduisant les effets de la gravité. On ne vous fera pas l’injure de vous rappeler ce principe physique découvert par Isaac Newton. L’une des architectures iso-élastiques les plus répandues est celle du « parallélogramme déformable ». Cependant, ce fonctionnement s’avère encore déficient quand le travailleur doit saisir puis poser des charges à un rythme élevé. C’est ainsi qu’a été imaginée l’assistance progressive. Le bras mécanique développe un effort différent selon sa position. Ainsi, pas d’aide lorsque les bras du travailleur sont baissés. Mais une assistance maximale lorsqu’ils sont en hauteur.
Selon une étude publiée par le cabinet ABI Research, le marché des exosquelettes devrait passer de 192 millions de dollars à presque 6 milliards. Le tout entre 2018 et 2028. Mais ce n’est qu’au prix d’innovations techniques que ce boom se réalisera. Et fera baisser drastiquement les maladies professionnelles dans les usines et ateliers.